• Fantaisie

    Il est un air pour qui je donnerais
    Tout Rossini, tout Mozart et tout Weber,
    Un air très-vieux, languissant et funèbre,
    Qui pour moi seul a des charmes secrets.

    Or, chaque fois que je viens à l'entendre,
    De deux cents ans mon âme rajeunit :
    C'est sous Louis treize; et je crois voir s'étendre
    Un coteau vert, que le couchant jaunit,

    Puis un château de brique à coins de pierre,
    Aux vitraux teints de rougeâtres couleurs,
    Ceint de grands parcs, avec une rivière
    Baignant ses pieds, qui coule entre des fleurs ;

    Puis une dame, à sa haute fenêtre,
    Blonde aux yeux noirs, en ses habits anciens,
    Que dans une autre existence peut-être,
    J'ai déjà vue... et dont je me souviens !

                              de Gerard de Nerval (1808 - 1855)

    Mon commentaire :

    Je sais ce poème a été lu et archi lu, pourtant à chaque fois je frémis à sa lecture, car il existe un pouvoir manifeste dans ces quelques vers, une musicalité sous jacente. J'aimerais moi aussi être nantie de cette capacité à créer un univers à partir de quelques lignes rythmées. C'est sans doute la différence entre le poète et un simple tacheron. L'un n'a besoin que de quelques mots pour réinventer l'univers, tandis que l'autre est une voix qui prêche dans le désert.

    J'espère qu'à votre tour vous saurez apprécier ces quelques vers.

    Tchuss


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  • If

    Tu seras un Homme...ma fille!

    J'adore IF..., le fameux poème de Rudyard Kipling.

    Je pense bien l'avoir lu une bonne dizaine de fois et à chaque fois je m'émerveille de la magnifique sobriété des vers, pourtant riches en enseignement. Chaque ligne est un appel au courage et à l'acharnement, un hymne à la sagesse et à la réflexion. En ces quelques vers Kipling a su résumer l'essence même de la vie. Mais on ne peut évoquer ce poème sans saluer l'audace de la traduction d'André Maurois. Ce dernier s'est totalement affranchi de la structure initiale pour restituer des vers d'une beauté musicale. Les puristes , s'offusqueront certainement des libertés prises avec le texte en anglais, pourtant en lisant les deux versions , on est frappé par le même degré d'intensité, le même souffle de vie. J'arrête mon bavardage cher lecteur et je te laisse déguster ces quelques moments de pleinitude.

    Si tu peux voir détruit l'ouvrage de ta vie
    Et, sans dire un seul mot te remettre à bâtir
    Ou perdre d'un seul coup le gain de cent parties
    Sans un geste et sans un soupir.
    Si tu peux être amant sans être fou d'amour,
    Si tu peux être fort sans cesser d'être tendre,
    et, te sentant haï, sans haïr à ton tour,
    Pourtant lutter et te défendre.
    Si tu peux supporter d'entendre tes paroles
    Travesties par des gueux pour exciter les sôts,
    Et d'entendre mentir sur toi leurs bouches folles
    Sans mentir toi-même d'un mot.
    Si tu peux rester digne en étant populaire,
    Si tu peux rester peuple en conseillant les rois
    Et si tu peux aimer tous tes amis en frères
    Sans qu'aucun d'eux soit tout pour toi.
    Si tu sais méditer, observer et connaître,
    Sans jamais devenir sceptique ou destructeur,
    Rêver, sans laisser ton rêve être ton maître
    Penser, sans n'être qu'un penseur.
    Si tu peux être dur sans jamais être en rage,
    Si tu peux être brave et jamais imprudent,
    Si tu peux être bon, si tu sais être sage,
    Sans être moral ni pédant.
    Si tu peux rencontrer triomphe après défaite
    Et recevoir ces deux menteurs d'un même front.
    Si tu peux conserver ton courage et ta tête,
    Quand tous les autres la perdront.
    Alors, les rois, les dieux, la chance et la victoire
    Seront à tout jamais tes esclaves soumis,
    Et, ce qui vaut mieux que les rois et la gloire,
    Tu seras un homme, mon fils.
    Rudyard Kipling

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  • 18 ans, fleur de beauté,

    et la mer qui gronde, près de la jetée,

    Et le sable dans lequel s'enfoncent,

    Tous tes rêves d'enfance,

    Au loin le soleil rejoint sa demeure,

    Alors qu'au fond de toi, quelque chose se meurt,

    Et les mouettes si blanches et si lointaines,

    Troublent ton silence de leurs voix inhumaines.

    Adieu vagues douces et chansons futiles,

    Adieux rêves fous et chateaux immobiles,

    La vie, ô raz-de-marée sauvage,

    Viens soudain de changer de visage.

    Commentaires de l'auteur.

    J'ai écrit ce poème vers l'âge de 18 ans. C'était pour moi une manière d'exprimer mes angoisses devant cette nouvelle qui m'attendait. Quoi de plus logique que de comparer les turpitudes de la vie adulte avec les mouvements de la mer. Il n'ya d'ailleurs pas de différences entre ces deux éléments. la mer peut paraître calme de prime abord, et on prend plaisir à se prélasser sur le sable, ou à construire des petits châteaux. Pourtant il suffit d'une vague agitée pour tout détruire en un seul coup et on réalise au fond que le sable n'a rien de solide et que rien n'est joué d'avance.

    je suis un peu plus âgée aujourd'hui, mais je trouve à un tournant de la vie, où une fois de plus une vague vient de tout balayer sur son passage. Peut-être faut il que je cesse de construire des châteaux de sable et qu'enfin je me décide à quitter les plages de l'enfance.


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